Il y a 10 ans, jour pour jour, renaissait l'espérance.
Ils étaient près de 3 000 ce 29 novembre 2008 à l’Ile Saint-Denis, autour de Jean-Luc Mélenchon, de François Delapierre et des premiers fondateurs, en présence de Robert Guédiguian et Oskar Lafontaine pour lancer ce qui fut une très belle aventure, le Parti de Gauche.
Avec mes 44 ans de vie militante, avec près de 20 ans de suivi de ce grand homme politique courageux qu’est Jean-Luc Mélenchon, j’ai regardé ce rassemblement avec un grand intérêt, avec beaucoup de prudence aussi, instruit comme je le suis des échecs douloureux vécus avec le PSU et la CFDT.
Ce lancement m’apparut cependant très vite comme la concrétisation d’une grande espérance, celle de voir renaître nos aspirations nées de mai 68 et des combats sociétaux inaboutis des années 70. Le choix fait par la plupart des fondateurs de quitter, comme je l’avais 25 ans plus tôt ce parti socialiste renégat qui avait trahi tous nos combats par l'amnistie des généraux félons d'Alger et son virage libéral de 1983, entraînant dans son sillage la CFDT que nous voulions construire comme le pivot du mouvement révolutionnaire…
Oh certes, divers choix de ce nouveau parti me paraissaient dangereux, cette notion du parti creuset et son corollaire du Front de Gauche dominé par le PCF où il me semblait, au su de mon expérience de quelques années de « compagnon de route » que ce dernier nous utiliserait pour se débarrasser de nous dès que nous ne serions plus utiles…
Mais, localement, un jeune camarade, Bastien, très jeune militant politique qui m’avait fort impressionné par ses capacités d’analyse et de débat lors du combat pour le non en 2005, était de cette fondation. Nous prenons le temps d‘en discuter. Meurtri lui aussi par le temps qu’il passa au PS, il sait me dire qu’au PG, nous pourrions enfin débattre de nos divergences librement, jouer les cartes de ce que nous voulions faire évoluer et j’adhère.
Commençait alors pour moi, une extraordinaire renaissance, finies les années tristes des échecs militants consécutifs à la recherche de l’inaccessible étoile d’abord chez les alternatifs où après de belles campagnes municipale d’Orléans, législative et cantonale, après la recherche difficile d’une agrégation des mouvements, nous vivons le délitement et l’essaimage dans la nature de ces militants prônant la non-organisation en recherche permanente de l’association des inorganisés…, finies les années de « compagnon de route » du PCF où, parce que, pas au parti, ta place éligible sur la liste est refusée mais ta place non-éligible est vivement souhaitée en raison de ta notoriété locale…
Le Parti de Gauche a été pour moi la renaissance politique, les combats retrouvés, sociétaux, celui de l’égalité des droits hommes/femmes, homos/hétéros, celui de l’anti-nucléaire et de l’écologie, celui du social et de ce thème extraordinaire qui coiffe le tout : la Révolution Citoyenne.
Nous travaillons, nous affichons, tout notre pays Giennois qui n’en a pas trop l’habitude, se couvre en permanence des affiches rouges de nos combats, des slogans de notre beau parti, nous réfléchissons, nous rêvons de ce temps où nous ouvrirons sur le Giennois notre local, où nous aurons notre journal et comment ne pas évoquer ces dimanches à réfléchir, amender les textes de notre ligne d’horizon, nous faisons adhérer, bref un temps radieux du bonheur politique retrouvé
2011, Bastien me propose d’être candidat à sa place au conseil national du parti, proposition appréciée à sa juste valeur, acceptée avec joie et je participe à mon premier CN ouvert par François Delapierre et clôturé par Jean-Luc Mélenchon. J’y découvre de jeunes camarades qui me rappellent ma propre expérience dans les conseils confédéraux de la CFDT en 69, ils auront nom Matthias, Alan, Raquel, Alexandre, Boris, Vincent, Bastien et tant d’autres qui sont restés pour la plupart, malgré les aléas dommageables qui se produisirent 5 années plus tard de très bons camarades, pour certains des amis estimés.
En rentrant, enthousiasmé de ce premier CN, je fais à mes camarades du Loiret mon compte-rendu, ne sachant pas encore que mon mandat serait renouvelé pendant 5 années, que je vivrais aux côtés de Valentin, un jeune camarade lui aussi qui était un ami, plusieurs de ces années de CN et deux congrès dont le sublime congrès de Bordeaux, celui ou François nous fit ajouter l'oeillet rouge à notre "panoplie" ignorant aussi que nous sortirions la plus belle des chartes écologistes, la charte écosocialiste du Parti de Gauche.
La présidentielle de 2012 fut un moment très fort,comment oublier ce meeting de la place Stalingrad, ces salles combles dans toute la France, ce serment de la porte de Versailles, ce beau résultat et même si j'ai jugé comme un marché de dupe la part qui nous fut réservée aux législatives, quel beau cru que ces milliers d'adhésions reueillies dans cette magnifique campagne.
2013, comme je l’avais subodoré, le Parti communiste que, grâce au Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon avait remis en selle, oubliait les accords et serments, s’alliait au PS à Paris et dans 50 grandes villes pour les municipales 2014 et je suis admiratif des capacités de notre petit parti qui, à Paris, se lance seul dans l’aventure, arrive à présenter des listes complètes dans les 20 arrondissements. Nous n’avions pas la capacité de faire quelque chose sur Gien, je me mets à la disposition des camarades de Paris, quelle belle expérience motivante, enrichissante !!! Malheureusement, le parti n’a pas compris dès cette époque qu’il était temps de sortir du FDG pour vivre en toute autonomie…
Investi à fond dans le parti, je me mets à la disposition de ce qui s’appelle le pôle organisation composé de volontaires compétents et sérieux mais vivant sans contrôle démocratique, et je viens chaque semaine depuis ma ville désertifiée et avec grand bonheur, donner une journée de mon temps à mon parti, expérience où je découvre la situation organisationnelle, bien loin de ce que j’avais appris comme permanent de la CFDT où l’on m’avait formé au triptyque nécessaire à tout développement : «organisation-formation-outil d‘information» qui nous avait si bien réussi alors. Malgré un travail régulier et assidu d’argumentation au CN et à deux congrès, je ne fus point entendu sur ce point…Dommage…
Et puis est venu le temps politique des déceptions, des tristes réalités politiques, cancers permanents des partis en ces moments où la recherche de la victoire électorale prend le pas sur la grande espérance, où la victoire nécessaire à la présidentielle fait oublier que cette dernière n’a qu’un objectif, celui d’enclencher la révolution citoyenne.
Le congrès de 2015 fut pour nous, pour moi, militants de l’organisation, de la sortie des traités un grand moment d’espoir, approuvée par 46 % des adhérents, notre plateforme alternative devait permettre une belle évolution…Le fonctionnement fit qu’il n’en fut rien et les régionales 2015 devaient aboutir à une situation interne difficile qu’il ne convient pas de commenter sur un blog de ce genre mais qui provoqua le départ de camarades méritants, sincères et d'un haut niveau d'analyse et d'action, je n'en citerai que quelques uns, Ramzi, Mathilde, Alexandre, Stéphane, Sébastien. Il aboutit hélas, mille fois hélas, avec déception et grande tristesse à mon départ du conseil national après cinq années vécues intensément qui auront marqué ma vie militante pour le temps qui me reste.
Ainsi les vieilles lunes sont revenues, le choix de la stratégie de la France insoumise, fort utile pour l’élection présidentielle mais dont je n’approuve ni la pérennisation ni l’évolution de la stratégie et qui, à mon sens, ne peut finir que comme ont fini les alternatifs a considérablement affaibli ce beau et prometteur parti et nous allons le payer très cher et pour longtemps.
Mais qu’on ne se méprenne pas, je ne suis ni aigri, ni révolté à la mode des curés ou des communistes défroqués, je suis un militant qui se bat pour des causes, celles qui furent toujours les miennes, celle du monde du travail, celle de l’écologie politique, celle de l’égalité des droits, celle de l’anti racisme et tant d’autres comme celles que le combat pour les arbres de Gien m’a permis de découvrir.
En ce temps où chacun se raccroche à tout ce qui bouge y compris ce qui s’agite porté par des idées dangereuses et incontrôlables, un Parti de Gauche clair, démocratique, solidement ancré dans les masses manque beaucoup au combat éco socialiste, ce phare d’un espoir renaissant. Malheureusement l'histoire se renouvelle et le départ récent de camarades de haute valeur soit de la direction soit du parti doit être analysé comme une sortie de route désastreuse.
J’en suis toujours cependant et j’en reste un militant, même si l’âge, la maladie, une certaine lassitude consécutive aux échecs normaux de cette vie trépidante, peuvent diminuer possiblement mes possibilités d’action. J’accompagnerai ce parti, qui m’a tant donné, dans son agonie et, si le reste de vie me le permet, je serai là au jour espéré de sa résurrection.
Je reste un inconditionnel de l’homme Jean-Luc Mélenchon dont le courage qui me fut révélé un soir de 1989, confirmé le 29 mai 2005, décisif dans ma volonté de l’accompagner il y a 10 ans, est pour moi indissociable de lui dire mon ressenti quand le mouvement qu’il a créé dépasse son fondateur et le fait dériver de la ligne initiale de notre parti commun : La Révolution citoyenne et rien d’autre…
Quoi qu’il arrive, quoi qu’on me dise, quoique l’on m’abreuve de propos acerbes voire insultants et quoi qu’on fasse l’aventure du Parti de Gauche est avec celle de la construction d’un syndicalisme révolutionnaire à la CFDT d’alors, la plus grande espérance de mon existence et la plus belle de ma vie militante et Jean-Luc reste l’homme qui aura incarné cette superbe renaissance politique des années 2000.