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50 ans après...
23 avril 2018

23 avril 2013- victoire incomplète de 45 ans de combats pour l’égalité

408735_478355455532936_160131224_nOui j’ai eu l’âme réjouie ce 23 avril 2013 et j’ai admiré le courage de Christiane Taubira devant ces torrents de haine et d’insultes comparables d’ailleurs à ces tonnes de boue reçues en 1975 par Simone Weil.

Enfin, même si cette loi occultait cette part d’égalité que nécessite toujours l’adoption du droit à la PMA pour les femmes en couple, même si elle restait trop imprécise sur le désir d’enfant des homosexuels surtout masculins, cette loi adoptée était pour nous, pour moi, militants des années 60/70 pour la reconnaissance de l’homosexualité, un grand soir de victoire, un de ces jours où l’on repense à toutes ces années, à ces combattants de la première heure comme Jean-Louis Bory, Guy Hocqueheim que nous avons occasionnellement côtoyés et qui disparurent bien trop tôt.

C’était un soir de 1971, lors de l’un de nos voyages en Yougoslavie, assis au bord de l’un des merveilleux  lacs de Plitvice. Avec mon ami Jean-Pierre, nous discutions comme souvent depuis notre rencontre en 1966 et notre participation très active à mai 68, à bâtons rompus, de la vie, de la société, de l’espoir. Nous vivions l’un avec l’autre, une amitié très profonde, pour ne pas dire ambiguë mais l’époque, l’éducation, l’environnement social  avaient fait de nos sentiments des réalités un peu honteuses. Les jeunes d’aujourd’hui auront sans doute du mal à comprendre cette situation mais il faut savoir se replonger dans les époques et les climats du moment.

Donc sur ce banc du lac de Plitvice, la discussion vient sur le combat initié par Jean-Louis Bory, celui de la réalité de l’homosexualité et du FHAR initié par Guy Hocquenheim.

« Je ne vois pas pourquoi, il faudrait haîr ces gens qui pratiquent leur sexualité comme ils l’entendent…Tu as rencontré JLB comme tu m’as raconté,  me dit Jean-Pierre »

« Oui répond-je, c’était lors d’une des journées auxquelles je participais au domaine de Bierville, le centre de formation de la CFDT- Dans le train qui menait à Saclas, Jean-Louis était à côté de moi, je lisais une interview de Guy Hocquenheim ce qui lui a permis d’entamer la conversation. Nous avons discuté de ses combats, de ses réalités, ce fut passionnant et très enrichissant »

La discussion nous mena très tard dans cette belle nuit du mois d’août, nous passionnant sur l’égalité des droits, la différence essentielle entre l’amour et le désir sexuel, la Palestine, Cuba et tant d’autres choses et je me souviens encore, longtemps après la douloureuse disparition de mon ami, de cette phrase qu’il prononça : «  et si notre vrai combat était de pouvoir, en couple reconnu, faire le voyage dans une  Palestine ayant retrouvé sa souveraineté ».

Les années ont passé, Jean-Pierre est décédé l’année de nos 28 ans, la Palestine n’est toujours pas libérée, seul subsiste l'espoiur de Cuba mais les meurtrissures du temps n’ont pas entamé mon implication dans ces vrais combats que nous devons à ce beau mois de mai d’il y a 50 ans….

En 1981, ce que nous croyions être la gauche accède au pouvoir, nos combats ont porté leurs fruits et le Président Mitterrand charge le mistre Forni et Robert Badinter , l’admirable combattant de l’abolition de la peine de mort d’exécuter sa promesse de campagne, lever les pressions sur l’homosexualité et rétablir l’esprit de la loi de 1791. Ce fut fait le 27 juillet 1982  première victoire pour les droits.

Malheureusement ces années furent aussi celles de ce virus du SIDA qui tua tant et tant de nos camarades militants et qui permis, une fois de plus, aux tenants de l’ordre moral, aux églises, de culpabiliser les homosexuels, voire comme aux USA d’en faire les porteurs d’une punition divine….

En 1984, fidèle à nos valeurs et tenaillé par un désir d’enfant, j’entame un autre combat, celui de l’adoption d’en enfant en célibataire, combat épique hélas infructueux qui dura 6 années et que je narrerai sans doute un jour de manière plus complète…

Le combat continue cependant sans relâche avec l’aide de philosophes comme Elisabeth Badinter. Un jeune sénateur socialiste que je ne connaissais pas, accepte d’écouter avec sérieux les arguments des camarades de ce combat. Avec grand courage et belle argumentation, il propose une loi sur « l’organisation de la vie commune des couples de même sexe ». Il s’appelle Jean-Luc Mélenchon, je l’ai découvert à cette époque, ai suivi ses courageux combats, ne l’ai jamais rejoint au PS pour les raisons maintes fois expliquées et me suis naturellement inscrit dans son sillage avec la création du Parti de Gauche. Quelles que soient les routes suivies sur lesquelles nous pouvons diverger, pour cet acte de courage (et tant d’autres depuis 25 ans) jamais, au grand jamais, on n’arrivera à me faire dire du mal de ce camarade.

La situation de 1993 a fait que son projet n’a pu être examiné mais le grain semé depuis 1970 avait germé et l’organisation de la vie commune s’invitait allègrement dans le gouvernement Jospin en 1997.

Pour ma part même si je mesure l’avancée que fut le PACS, je ne garde pas de cette période un souvenir enthousiaste. Le PS porté par l’évolution des mentalités, ne pouvait éviter ce débat mais  il le porta la honte au front. Le projet est élaboré, le 12 octobre 1998, j’étais en formation de cadre supérieur à l’ESSEC, je sèche mes cours pour assister à ce débat tant espéré. Il fut ignominieusement boycotté par les députés de la majorité PS, ce qui conduit à son report et fit dire à Noêl Mamère que «  le PS, en fait, ne voulait pas d’une loi pour les pédés". Déçu depuis 15 ans par l’orientation de ce parti, je sais que ce jour-là, une fracture irréversible s’est définitivement creusée entre eux et moi.

La ministre de la justice parla d’incident de la vie parlementaire et promis un nouveau texte pour 1999. Celui-là fut émaillé de déclarations diverses et variées pour rassurer la « bien- pensance » populaire, la ministre parlant de texte pratique pour des accompagnants de personnes âgées, de cousins voulant rompre la solitude , le premier ministre assurant qu’il fallait que cette loi voit le jour mais que bien sûr, comme chacun le sait, il n’était pas concerné par ces tendances…bref autant d’âneries destinées à rassurer ses députés qui avaient si bien illustré leur opposition le 12 octobre….

Cerise sur le gâteau, un « quarteron de maires de droite » annonce qu’en aucun cas, ils ne célébreront de mariage homosexuel… Qu’à cela ne tienne, la ministre recule devant leur diktat et annonce que la cérémonie se réduira à une déclaration devant le tribunal. J’ai vécu cette décision comme la pire des trahisons, ainsi la vie commune se déclarait en cati-mini, loin de la représentation républicaine mais bon la loi est votée, promulguée, nous avons avancé….un peu... grâce à nos combats et à la proposition de loi Mélenchon.

Puis est venu 2002, l’avènement de la droite républicaine, suivie de la victoire de la droite forte, bref 10 années où il était hors de question que le PACS évolue.

Mais la réalité est plus forte que la réaction, le PACS a permis que des couples s’organisent et réfléchissent à leur situation, certains posant le souhait du mariage. Le député-maire Noël Mamère pose avec courage un acte symbolique en mariant deux hommes dans sa mairie de Bègles.

Certes je n’ai jamais été fan du mariage hétéro ou homo et j’ai longtemps pensé que la vie de couple organisée, protégeant les enfants et les intérêts du couple suffisait. Le mariage n’était pour moi qu’un sacrement religieux qui ne concernait pas la République. Mais bon, il était souhaité, il était légitime, en terme d’égalité des droits, qu’il soit possible à toutes les formes d’union d’avoir les mêmes droits.

L’arrivée aux affaires du PS en 2012 permit donc que ce débat fut posé. Il est des situations historiques qui exigent qu’un élément du programme élu soit voté très très vite avant qu’on ne laisse s’organiser une réaction, ce fut le cas de l’abolition de la peine de mort, ç’aurait pu être le cas pour le mariage pour tous, ce devrait être le cas demain pour la Constituante.

Mais, calculant sans doute l’intérêt à retirer d’une division des Français sur ce point pendant que les lois sociales difficiles à avaler seraient débattues, le gouvernement ne le posa pas en première session et choisit de poser ce débat dans le temps sur la place publique.

Il ne rata pas son coup, les forces de l’homophobie se déchaînèrent, les prières de rue des extrémistes religieux cathos ne gênaient aucune des personnes promptes à les dénoncer quand elles sont musulmanes, les manifestations du mouvement MPT auquel se joignaient les églises et  beaucoup de forces de la droite sarkosiste se développaient, nos manifestations aussi.

Bon finalement le 23 avril 2013, la loi fut votée. Portée par une ministre courageuse et brillante, les premiers mariages furent célébrés, heureux pour ma part de recevoir leurs témoignages de bonheur et de leur envoyer mes félicitations….

Cependant notre combat pour l’égalité n’est pas terminé, loin de là, la PMA pour les femmes en couple est loin d’être seulement abordée, le droit à l’adoption par des couples homos est sans cesse rendu difficile, la GPA est jetée aux orties alors qu’elle peut être encadrée et non marchande et l’émergence de la MPT a ravivé tragiquement els actes homophobes…

La vie est un combat…le bonheur aussi.

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